anomaly (maxwell)

Il a roulé pendant des kilomètres et des kilomètres, toute sa vie sur la banquette arrière de la voiture; les documents officiels, les souvenirs et les fringues, quelques spécimens précieusement enveloppés dans de vieux journaux, entassés dans un carton affaissé. Les yeux scotchés au rétroviseur, le sommeil tenu à bout de bras par les cafés insipides des stations service et des burgers engloutis sans s'arrêter. La peur au ventre, l'urgence de traverser les frontières entre les États le plus rapidement possible; d'en franchir le plus possible.

Et il ne sait même pas si ça en vaut la peine.

L'univers s'est retourné d'un coup, le tapis tiré sous les pieds si violemment qu'il ne sait pas comment s'en remettre. S'il va s'en remettre. Dans sa précipitation, il n'a pris que l'essentiel; a tout juste pensé à envoyer un message à Benedict (et pas un des plus tendres) avant de balancer la carte SIM de son téléphone par la fenêtre. Les paysages défilent, les températures grimpent, puis redescendent, et toujours il roule, jusqu'à l'orée d'une petite ville de Virginie. La voiture est vendue à petit prix, paie le motel pour les quelques jours qu'il passe à fermer ses comptes et en ouvrir d'autres, à démissionner, à contempler l'ampleur de ce qu'il vient de faire.

Et il ne sait toujours pas si c'est utile.

Ne sait pas s'il vient de foutre sa vie en l'air pour rien, pour un malentendu, pour des histoires qui pourraient être vraies... ou fausses.
Mais c'est la peur qui a gagné. Peur, ou prudence ? Il oscille toujours entre les deux, tantôt convaincu d'avoir fait la bonne chose, tantôt persuadé d'avoir fait la pire erreur de sa vie.

Aada Sawyer, 3 Parkway drive

Une valise antique a remplacé le carton contenant ses spécimens les plus précieux, emmitouflés de ses vêtements. Il grimpe la colline, sac sur l'épaule et valise à la main, poussé par les derniers fragments d'espoir de ceux qui n'ont pas encore tout perdu. Il se raccroche à l'idée que ce n'était pas en vain; qu'il a fait le bon choix en suivant son instinct; qu'il n'a pas tout foutu en l'air pour des broutilles. Qu'à l'issue de cette rencontre, il aura un toit.

deux jours plus tard

Le Morpho helenor pindarus est endommagé et pourtant Maxwell n'a pas le coeur de le jeter. Il trouve sa place contre un mur, malgré l'aile rabibochée, au centre de la petite galerie qui orne le mur de ce qui se veut le coin lecture. La chambre est spacieuse, malgré tout; il faut dire qu'il n'a pas grand chose pour l'encombrer. Heureusement, elle est déjà meublée. Les vêtements sont rapidement rangés dans la commode de bois, les spécimens fixés au mur, les documents glissés dans le tiroir du bureau de travail. Le lit est nu; il y a le matelas, mais ni draps ni oreillers. La salle de bains partagée à l'étage ne comporte que quelques items de base, les produits d'un autre locataire qui est à l'extérieur pour quelques jours.

le lendemain

— Je vois que tu t'es bien installé. Oh, c'est un Phobaeticus chani ? Magnifique. Je passais simplement vérifier que tout va bien. Donc... Tout va bien ? Le lit est... vide. Oh, honey, tu aurais dû me dire que les temps étaient difficiles ! J'ai tout ce qu'il faut dans la maison, je t'emmène tout ça.

Les draps sont doux, les couleurs fanées; la courtepointe aux même couleurs que les rideaux, de tons pastels fleuris; une jolie catalogne est pliée et placée avec soin au bout du lit. Ce n'est pas chez lui, mais c'est sa maison; et Aada n'est pas sa famille à proprement parler, mais elle agit tout comme. Et peut-être, peut-être qu'il arrivera à tout recommencer.

max a écrit:les vêtements d'extérieur laissent place au combo sweatpants, sweatshirt et chaussettes de laine dès la porte de son appartement refermée

perspicace (le don de deviner ce qui se cache derrière la façade)

jamais a-t-on vu quelqu'un d'aussi frileux ; les pulls même en été, l'écharpe perpétuellement autour du cou, le plaid sur les genoux à la moindre occasion. inconcevable de mettre le nez dehors sans une veste ; les vêtements d'extérieur laissent place au combo sweatpants, sweatshirt et chaussettes de laine dès la porte de son appartement refermée, et il bénit chaque jour (et chaque nuit) le foyer qui trône en plein milieu de son salon.

piètre cuisinier qui préfère largement la commodité du petit resto du coin ; peut-être serait-ce différent s'il se donnait la peine d'apprendre, mais pourquoi se farcir une telle tâche quand il peut dépenser tout son salaire en junk food ?

j'ai hâte qu'il renverse une tasse de café sur amyas